S’emparer de la foudre

S’emparer de la foudre

Photo © Ernesto Timor - Mini-golf sentimental
Août 2018, Bourgogne. En combien de coups ?

Tant qu’il vécut chez les Shuars, il n’eut pas besoin de romans pour connaître l’amour. […] La femme offerte l’emmenait sur la berge du fleuve. Là, tout en entonnant des anents, elle le lavait, le parait et le parfumait, puis ils revenaient à la cabane s’ébattre sur une natte, les pieds en l’air, doucement chauffés par le foyer, sans cesser un instant de chanter les anents, poèmes nasillards qui décrivaient la beauté de leurs corps et la joie du plaisir que la magie de la description augmentait à l’infini.
C’était l’amour pur, sans autre finalité que l’amour pour l’amour. Sans possession et sans jalousie.
— Nul ne peut s’emparer de la foudre dans le ciel, et nul ne peut s’approprier le bonheur de l’autre au moment de l’abandon.

Luis Sepúlveda, Le vieux qui lisait des romans d’amour (traduction François Maspero, éd. Métailié, 1992.)

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J’imagine que chez les Shuars il n’existe pas non plus de mini-golf. Voici un petit bonheur un peu suranné qu’on peut leur envier…
L’accouplement de ce beau roman (redécouvert tout récemment, magnifié par la chaude voix de Féodor Atkine) et de cette vision de Saône-et-Loire entre chien et loup n’allait pas de soi. Les deux éléments étaient orphelins depuis un moment dans ma corbeille à brouillons. Allais-je redonder avec une image de chair en émoi pour l’un et une règle rouillée du jeu de l’amour et du hasard pour l’autre ?… Là au moins, on a de quoi s’amuser un peu en les regardant se faire face…