Travaux personnels, galeries d'art et d'essai

Mon lieu secret, des Lyonnais dans l’œil d’Ernesto Timor : le livre !

Une aventure photographique, des expositions… jusqu’à un livre pas banal !

Le sens de Mon lieu secret a été de photographier les gens dans un cadre qui prolonge peu ou prou leur paysage intérieur. Un lieu auquel ils tiennent profondément, d’ampleur variable (du grand panorama au petit cabinet), privé ou public, mais qu’ils ont envie de me présenter : un lieu dont ils sont prêts à entrebâiller le secret pour le plaisir d’un partage pas banal. Chacun est libre d’interpréter à sa façon cette notion de lieu secret, je ne pousse personne vers du plus typique, du plus insolite ou du plus intime que son choix initial !

Depuis mon cycle Les limites nous regardent, j’ai toujours affectionné les projets de portraits in situ, dans le secret du territoire de chacun, en ces décors incertains où on ne fait plus bien la différence entre le cadre de vie et le paysage intérieur. Pas davantage dans une prétention documentaire que dans une envie de mise en scène minutieusement orchestrée, je poursuis un fil fragile où je m’accommode de ce qui est disponible (lumières comme humeurs), où l’imprévu est ce qui fait vivre, où l’étrangeté est au coin de la rue.

Installé à Lyon d’assez fraîche date, j’y suis curieux de son urbanité dans les deux sens du terme, de ses habitants comme de ses lieux… C’est ainsi qu’a démarré ce projet, au petit bonheur des rencontres, dans l’idée que cette galerie de portraits serait riche de sa diversité et de son évolutivité et trouverait en chemin sa cohérence. Une cartographie mentale s’est dessinée bien plus qu’un énième circuit du Lyon insolite, une manière de dire en images comment chacun peut vivre son espace intime dans une grande ville.

Je ne suis pas parti à la recherche de Lyonnais notables ou de lieux typiques, je ne fais pas dans le catalogage. De souche ou nouvel immigrant, voire expatrié, connu dans certains cercles ou au contraire plutôt discret, tout profil a sa place. Ce qui compte avant toute chose est l’implication sincère de chacun, son envie de livrer quelque chose pour de vrai, son talent spontané à s’approprier les lieux. Les contacts se font donc au travers de sollicitations amicales d’abord, de bouche à oreille et de recommandations ensuite, ce ne sont pas des portraits qui peuvent s’improviser avec des inconnus pressés. Initié début 2011, il est dans la nature de ce projet de prendre son temps ! À mesure des rencontres, il s’est formé une galerie que je veux mixte et diverse mais sans prétention de représentativité géographique ou sociale.

La publication en livre photographique semblait la forme idéale pour donner à voir un large panorama des images dans leur diversité, établissant un lien attentif et familier entre chaque portrait et le lecteur. Un travail d’écriture de notices a été mené avec le souci de fournir quelques clés, en respectant la part d’indicible, voire de mystère, inhérente à certaines de ces situations.

Les éditions Libel ont choisi de publier ce livre, selon un projet éditorial qui combine l’exigence d’un ouvrage artistique de grand format et belle tenue et l’envie de coller à sa nature de chantier encore ouvert, sans prétendre à une somme définitive.
Sa sortie coïncide avec la tenue d’une exposition de ce cycle photographique à la Passerelle (galerie de la MJC Monplaisir, Lyon 8e, en novembre 2013, en Résonance à la Biennale de Lyon (tous les détails sur l’expo).

Ernesto Timor

 

Plus de mots….
  • Un entretien sur le projet figure en ouverture du livre. Cet entretien, mené à Lyon sous le feu croisé de Frédéric Bellay (photographe) et Benoît Roux (éditeur), est publié en avant-première, sous le titre Territoires de l’intime, dans une nouvelle rubrique de mon site nourrie d’entretiens et interviews réédités par moi-même, avec soin et images bonus !
  • Citons trois beaux articles, chacun fruit de riches entretiens de vive voix : à la une de Rue89 Lyon début juillet ; une chouette double page dans le bimensuel A nous Lyon de début octobre (voir l’article) ; la page « coup de foudre » du trimestriel Ego La Revue (voir l’article). D’autres papiers sont parus dans Le Progrès, Lyon capitale, Lyon Citoyen… et bien sûr sur divers blogs… Vous retrouverez le meilleur de tout cela à la page Revue de presse.



Un portrait se regarde en s’enfermant dedans, se laissant transpercer par l’élégance des ombres dont on veut taire le nom, menant à la perfection l’inondation des signes.
Le lieu secret du photographe et du modèle, du kidnappeur et de celui qui consent à se laisser capturer par la lumière, ce lieu-là est une alchimie entre tous les autres lieux possibles et inimaginables.
C’est même l’apparition d’un lieu qui n’existe pas. Un portrait est un lieu qui n’existe pas mais dont la ressemblance bascule.
Tout le monde alors s’engouffre dans ce qui est posé à plat sans comprendre pourquoi l’émotion capturée capture à son tour.
Un portrait est un lieu-frontière pour effacer les contours, perdre connaissance, réapparaître dans l’image qui nous regarde.
Un portrait est le scintillement d’une présence.

 

(Extrait de la préface de Dominique Sampiero.)